Le gaspillage perdure dans le domaine alimentaire en France*, alors que beaucoup de personnes sont en situation de précarité. Face à ce constat, des associations se mobilisent pour faire bouger les choses. Focus sur trois d’entre elles, à Paris et à Nantes, qui se sont engagées à la fois contre le gaspillage alimentaire et en faveur de la solidarité.

Une pâtisserie solidaire qui cuisine à partir d’invendus

À Nantes, l’ouverture de « L’atelier Anti-Gaspi et Solidaire » en octobre 2020 a fait grand bruit. Cette pâtisserie, située dans la galerie d’un grand centre commercial, innove en effet sur plusieurs plans. L’association Handicap Travail Solidarité (HTS), qui est à l’origine de ce projet, l’a à l’origine créée pour sensibiliser le grand public au handicap. La boutique fait donc travailler au quotidien une quinzaine d’employés en situation de handicap psychique directement au contact des clients.

Mais le projet va plus loin. L’association a en effet signé un partenariat avec le supermarché du centre commercial. Il donne ainsi ses invendus de pain, de fruits et légumes aux employés, à partir desquels sont fabriqués les produits. Cookies, gâteaux, mais aussi smoothies sont ainsi élaborés en fonction des aliments récupérés. Si l’accueil des clients et les retours ont été positifs, la boutique a malheureusement dû provisoirement fermer ses portes  à cause de la crise sanitaire. Depuis le début de l’année, l’association est en cogestion avec l’Adapei de Loire-Atlantique. En attendant la réouverture de L’atelier, elle travaille sur la création de corners fonctionnant sur le même principe dans d’autres galeries marchandes.

« Farinez-vous » : insertion professionnelle et développement durable

À Paris, depuis 2009, les deux boulangeries « Farinez-vous » se distinguent par leur volonté d’employer des personnes en insertion professionnelle. Un souhait de leur fondatrice, Domitille Flichy. «Il me tenait à cœur de créer une activité qui fasse de l’insertion. Nous nous positionnons donc comme employeur solidaire ». Les employés recrutés, tous éloignés de l’emploi, sont formés sur place pendant deux ans aux métiers de boulangerie. « Ces années d’expérience sur leur CV vont leur permettre ensuite de trouver facilement un poste.»

Parallèlement, les deux boulangeries essaient au maximum d’œuvrer en faveur du développement durable. « C’est une démarche globale. Nous souhaitons acheter les matières premières localement, et bio lorsque c’est possible ». L’aspect anti-gaspillage alimentaire a également été pris en compte. « Un consultant a travaillé sur ce sujet pendant un an avec nous. On analyse ce qu’on jette, on essaie de ne pas avoir d’invendus et on réutilise certains produits : le pain pour faire des quiches par exemple .Mais le nombre de clients est très variable depuis la crise. C’est donc plus compliqué de prévoir nos ventes à l’avance et de gérer au mieux nos stocks.

En janvier dernier, une école de formation au métier d’aide-boulanger a été lancée, cette fois via l’association créée par Domitille Flichy, ouverte aux personnes n’ayant pas le niveau CAP. Un pas de plus en faveur de l’insertion sociale.

Les Hôtels Solidaires luttent contre le gaspillage dans l’hôtellerie

C’est en 2018 que le veilleur de nuit d’un hôtel parisien fait le constat effaré du gaspillage en place sur son lieu de travail. « Antoine Janot, un de nos créateurs, devait jeter tous les jours les viennoiseries non consommées et les produits d’hygiène entamés », commente Judicaël Eymard, coordinateur de l’association.  « Il a donc créé l’association Les Hôtels Solidaires, qui organise des collectes de ces produits au sein d’une soixantaine d’hôtels et les redistribue à  Les Centres d’Aurore  par exemple ou à l’Armée du Salut. Les quantités sont vraiment considérables ».

Or, depuis la crise sanitaire, cette activité a fortement baissé, puisque 70% des hôtels sont fermés. « Nous avons dû modifier notre activité. Notre réflexion globale sur le gaspillage nous a fait réaliser que le fait d’avoir des chambres d’hôtels vides s’apparentait à du gaspillage. » Des hôteliers partenaires proposent donc désormais de prêter des chambres libres à des familles d’enfants malades. Mais l’association veut encore développer son concept. « Nous allons bientôt créer L’atelier des Solidaires. Des personnes en insertion refaçonneront les draps en bon état donnés par les hôtels afin d’en faire des sacs à vrac par exemple. Notre but est que cet atelier inclusif et intergénérationnel devienne à terme économiquement pérenne.»

*Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie), chaque Français jette 29 kg de nourriture par an en France.